|  Blue moon in Nanuq's Cove
 Nanuq 2015 : Qaanaaq - Stormy Bay - Embâcle 
                    dans Nanuq's Cove 
   
                     
                      | Région 
                        de Qaanaaq - automne et embâcle |   
                      | 
 
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                      | Extrait de la carte de navigation Harward 
                        Oer et Qeqertat (© Kort & Matrikelstyrelsen, 
                        Miljoministeriet, Danmark) |  Automne 9 : 
                    Il fait nuit (30 novembre 2015) 
 Si vous lisez ce message, c'est que la communication avec 
                    Qaanaaq est rétablie. Depuis bientôt trois mois 
                    nous sommes matériellement coupés de monde. 
                    Car en l'absence de lourdes infrastructures la période 
                    d'embâcle empêche toute communication avec le 
                    monde extérieur. Ceci ne nous a pas empêché de continuer à 
                    documenter la vie à bord et avec plus ou moins de retard 
                    vous découvrirez le récit de la période 
                    d'embâcle à partir de notre dernier message du 
                    28 septembre - 'immaqa' - dans l'ordre chronologique:  Il fait nuit ...  ... le mercure s'est rétracté sous la marque 
                    de -30°C. La température moyenne des mois d'hiver 
                    à Qaanaaq est de -25°C; à Qeqertat il fait 
                    deux degrés de moins qu'à Qaanaaq et à 
                    'Nanuq's Cove' il fait trois degrés de moins qu'à 
                    Qeqertat ... En ce moment la pleine lune nous gratifie d'un 
                    jour sans nuit - d'ailleurs, elle ne se couche plus. Le pays 
                    est désormais recouvert d'une fine couche de neige 
                    fraîche, poudreuse et lumineuse: blue-moon, magique! Nanoq - l'ours blanc - a été aperçu 
                    à l'Ouest. C'est le 5ème qui tente de remonter 
                    le grand fjord. Nous redoublons de vigilance. Les promenades 
                    se font accompagnées de chien, de fusil et de puissantes 
                    frontales. Demain notre stock de nourriture pour chien sera 
                    installé bien en vue à l'entrée de notre 
                    camp. Ainsi l'ours curieux pourra manger à sa faim 
                    en nous laissant le temps de nous retourner - si nécessaire. Les grands chantiers en plein air sont terminés, ce 
                    qui inclut l'installation de la station météo 
                    qui mesure et enregistre à présent vents, rayonnement 
                    solaire, albédo, température de l'air, de l'eau 
                    et enfin le flux de chaleur qui traverse la banquise (cf. 
                    page science). Les batteries prévus 
                    au départ pour un fonctionnement en autonomie ne tiennent 
                    pas le froid et nous avons du installer la station à 
                    portée de câble du bateau, à une cinquantaine 
                    de mètres.  Crépuscule à midi : Nanuq 
                    et la station météo au premier plan (photo Kalle 
                    Schmidt)
 Les aménagements pour accueillir le grand froid sont 
                    terminés. L'excellente isolation d'une part et la chaleur 
                    relative de l'eau sous la banquise d'autre part assurent un 
                    équilibre thermique qui demande peu pour fournir un 
                    habitat confortable. Pendant la 'journée' le petit 
                    chauffage fonctionne par intermittence pour maintenir une 
                    température agréable. Durant les périodes 
                    de sommeil le chauffage est coupé et en l'absence d'activité 
                    à bord la température baisse progressivement 
                    vers 5°C dans le carré et proche de 0°C dans 
                    les cabines. A ce moment, les gros sacs de couchage assurent 
                    une bulle de chaleur protectrice et un repos réparateur 
                    - nul besoin de lutter durant le sommeil pour assurer la thermogénèse. Le système de récupération et de préchauffage 
                    d'air est étonnant. La capture ci-dessous montre quelques 
                    mesures en cours. L'air frais est pulsé dans la cabine 
                    pratiquement à la même température que 
                    l'air intérieur avec pour seule énergie utilisée 
                    le fonctionnement de 2 petits ventilateurs - quelques Watts. 
                    Le réservaoir de production d'eau potable en sortie 
                    a été supprimé, la température 
                    de l'air rejeté étant trop proche du point de 
                    congélation. Et pour le moment nous disposons de l'eau 
                    liquide en abondance en provenance des lacs - tant que nos 
                    pourrons traverser la couche de glace qui s'épaissit 
                    de jour en jour.  The passive igloo project - capture 
                    instantanée de l'interface RTML (Loggernet). L'air 
                    extérieur (-16.2°C) est aspiré via un tube 
                    immergé qui sert au préchauffage de l'air (-10.1°C) 
                    qui entre dans un récupérateur de chaleur (au 
                    centre) pour en limiter le givrage. Une sonde d'humidité 
                    (HR) régule le débit d'air. L'air frais préchauffé 
                    est introduit dans la cabine (16.8°C). L'air usé 
                    quitte le bateau à une température proche du 
                    point de congélation (1.3°C). (by peter Gallinelli)
  Avec le froid le 'passive igloo project' entre enfin dans 
                    sa phase opérative. Son but est de traverser un hiver 
                    arctique en autarcie et sans recours à des énergies 
                    non renouvelables, base d'exploration des possibilités 
                    et des limites de l'habitat de demain qui sera nécessairement 
                    passif. Nous nous sommes cependant fixés à ne 
                    pas nous obstiner à atteindre cet objectif par une 
                    surenchère de technologie, car ce serait un luxe trop 
                    exclusif. Il s'agit plutôt de réduire la dépendance 
                    aux énergies non-renouvelables de manière radicale 
                    en explorant de préférence des solutions robustes, 
                    intelligibles, immédiatement reproductibles et économiquement 
                    viables. "Une bonne solution est une solution qu'on peut oublier". 
                    S'il est encore trop tôt pour tirer des conclusions 
                    sur tous les systèmes, l'isolation thermique renforcée 
                    fait unanimement partie des bonnes solutions. En un mois nous avons consommé à peine un plein 
                    de carburant (50 litres), très peu étant donné 
                    le froid mordant, le peu de vent et les moyens simples pour 
                    y parvenir: une excellente isolation thermique, une éolienne 
                    et un récupérateur de chaleur. Pompe à 
                    chaleur et stock de chaleur ont dû être sacrifiées 
                    en raison de la limite de budget. Ainsi un premier bilan nous 
                    indique que sur le mois passé nous avons absorbé 
                    un flux d'énergie primaire de 250W/personne pour satisfaire 
                    aux besoins du chauffage, l'éclairage, les appareils 
                    électriques, l'eau chaude et la cuisine. C'est 10 fois 
                    moins que la moyenne suisse alors que notre température 
                    extérieure était de près de -20°C. 
                    Au-dessus de 0°C (c'est la température du mois 
                    de janvier sur le plateau suisse) le chauffage, plus gros 
                    consommateur, n'est plus nécessaire. L'hiver à 
                    venir nous en apprendra sur ces systèmes dans la durée 
                    et dans les conditions les plus sévères. Nous 
                    sommes impatients!  Blue Moon : pleine lune (ou presque) 
                    sur la banquise. Nanuq dans son élément. 25 
                    novembre | 77.5°N | -25°C (photo Kalle Schmidt)
  Ainsi, nous nous enfonçons progressivement dans l'hiver 
                    arctique froid, sombre et magique. Ce sera probablement notre 
                    dernier message avant la fin de l'année. Un dernier 
                    message qui prendra la route demain, à l'occasion de 
                    notre prochaine visite au village. Une longue route semée 
                    d'incertitudes. Notre chez nous est à présent 
                    à bord de Nanuq. Nul retour possible en arrière. Alors nous regardons en avant et vers les aventures à 
                    venir. Il nous reste à mettre en place quelques capteurs 
                    qui garderont un oeil critique sur ce que nous vivons de façon 
                    parfaitement subjective. Les deux méthodes se complètent. 
                    Nous sommes ici pour en apprendre sur l'habitat et ses habitants 
                    - nous - dans un environnement peu commun. Pour nous, Team Nanuq, l'idée de passion concerne 
                    l'expérience de nouvelles couleurs et parfums, la rencontre 
                    avec les autres, la nature et nos limites. Notre 
                    moteur sont un vif intérêt pour ce qui se cache 
                    derrière l'horizon, la soif de comprendre et la curiosité 
                    d'innover et de tenter des nouvelles choses - et à 
                    ce titre nous sommes comblés. Les défis du moment sont: 
                    la gestion du sommeil : décalage croissant naturellement 
                      de 45 minutes par jour...la gestion de l'énergie en situation de vent nul 
                      (10+ jours)la rupture de communication avec Qaanaaq et le reste du 
                      monde Tout va bien à bord :-) Nous vous souhaitons de très belles fêtes et 
                    un magnifique hiver. Bai- takussagut (*)Peter & crew
 (*) Kalaalit ('baï takouch') = à bientôt! 
 Automne 8 : 
                    Travaux sur la banquise (20 novembre 2015) Grosse chute du baromètre - troisième coup 
                    de vent du Sud. Après un avant-goût d'hiver avec 
                    une période à -20°C et les premières 
                    aurores boréales, le ciel est bas, le vent souffle 
                    en rafales de 50 noeuds et la température est positive. 
                    Oui, ce vent apporte de l'air tempéré de bien 
                    loin. Libéré de ses aussières à 
                    terre, Nanuq est cependant parfaitement protégé 
                    dans son berceau de glace. Les rafales nous font giter de 
                    quelques degrés, à peine perceptibles. Notre 
                    'mouillage' est parfait!   Rigide comme de la tôle il y a encore quelques jours, 
                    nous profitons du chaud pour plier définitivement l'annexe 
                    pneumatique devenue inutile, mais qui nous a servi encore 
                    récemment car la banquise a du mal à se former 
                    à proximité de la terre à cause du marnage 
                    - près de 3 mètres en vives eaux (pleine et 
                    nouvelle lune). A présent il suffit de sauter d'un 
                    glaçon à l'autre en prenant garde de ne pas 
                    s'enfoncer dans les interstices de glace molle. Nous venons de finir d'installer le prototype de ventilation 
                    de notre 'iglou'. Si d'une part l'oxygène est indispensable 
                    pour assurer la survie des occupants (!), l'humidité 
                    doit être évacuée pour empêcher 
                    la cabine de se transformer en grotte humide et insalubre. 
                    Cependant, de ventiler sans précaution ferait entrer 
                    le froid dans notre cocon de chaleur. Le système utilise 
                    donc la chaleur de l'eau de mer (-1.5°C) pour le préchauffage 
                    de l'air frais arctique (bien plus froid que l'eau de mer) 
                    suivi d'un échangeur qui préchauffe l'air entrant 
                    en utilisant la chaleur récupérée dans 
                    l'air usé extrait de la cabine. La régulation 
                    se fait en fonction du taux d'humidité de l'air intérieur. 
                    C'est un bon indicateur de présence et d'activité. 
                    Et ça fonctionne à merveille! Nous sommes curieux 
                    d'en apprendre sur la durée. Nos visiteurs sont bien intrigués par cette installation 
                    à mi-chemin entre technique et tradition : à 
                    la façon d'un filet de pêche le tube est immergé 
                    sous la banquise par un lest fait de pierres et suspendu à 
                    2m de profondeur par des garcettes frappées sur des 
                    taquets de glace (bien visibles sur la photo ci-contre).  Travaux sur la banquise: installation 
                    du puits canadien servant à préchauffer l'air 
                    frais. Le bloc à droite découpé dans 
                    la banquise sert de support de prise d'air. Il donne une idée 
                    de son épaisseur. Avec le froid les blocs se soudent 
                    aisément. (photo Kalle Schmidt)
    Travaux à la frontale; par temps 
                    couvert il y a à peine un crépuscule. A droite: 
                    devant l'échangeur l'ordinateur et le microcontrôleur 
                    qui commande les ventilateurs et le système qui prévient 
                    le gel dans l'échangeur de chaleur (photo Peter Gallinelli)
 Les défis du moment sont: 
                    la gestion de l'humidité dans et autour du bateau 
                      - environnement salin, séchage, condensation, points 
                      froids l'hygiène et la lessive - les lavages et lessives 
                      sont énergivores et produisent beaucoup d'humiditéla nourriture - un bon moral culinaire et vitaminé 
                      malgré un régime de base restreintla gestion de l'énergie en situation récurrente 
                      de vent faible Aujourd'hui c'est Byzance. Il y du vent en abondance et l'éolienne 
                    tourne à plein régime. Chauffage et séchages 
                    complets par de petits radiateurs électriques - très 
                    appréciable quand on sort d'une longue période 
                    de calme. Car nous comptons sur une charge par semaine pour 
                    maintenir nos accumulateurs chargées... L'embâcle est complète. C'est parti pour l'hiver. 
 Automne 
                    7 : Crépuscule sur Qeqertat (8 novembre 2015) C'est dimanche au paradis de la glace. Notre Univers ne cesse 
                    de se transformer. Désormais le jour se réduit 
                    à un crépuscule furtif. Depuis quelques jours 
                    le mercure côtoie la marque du -20°C et continue 
                    de baisser. A cette température la glace s'épaissit 
                    rapidement rendant la banquise praticable en toute sécurité 
                    ce qui nous vaut de belles excursions. Avec l'embâcle 
                    les distances se raccourcissent car les routes sur la banquise 
                    sont incomparablement plus directes. Il s'agit à présent 
                    d'habituer nos jambes à la démarche sur la glace 
                    vive et glissante qui nous fait découvrir des muscles 
                    insoupçonnés.    Promenade sur la glace fraîchement 
                    formée: 20cm d'épaisseur pour se déplacer 
                    en sécurité (photos Peter Gallinelli)
 Cette nouvelle donne nous vaut aussi les premières 
                    visites de nos amis du village. Ainsi, depuis quelques jours, 
                    notre équipage s'est agrandi d'un membre: Sara, la 
                    chienne de garde groenlandaise que nous prête la jeune 
                    fille de Qeqertat du même nom qui vient régulièrement 
                    nous rendre visite en traineau avec son père pour prendre 
                    la 'kaffi' à bord. C'est l'occasion de cultiver notre 
                    vocabulaire groenlandais.  Les activités de chasse et de 
                    pêche depuis la banquise ont commencés (photo 
                    Kalle Schmidt)
 Nous accompagnons Thomas installer son filet de phoque et 
                    nous sommes impressionnés par la simplicité 
                    et l'efficacité de son dispositif; pas un outil ni 
                    de geste superflu. Nous vivons l'illustration vivante d'une 
                    citation d'Antoine de Saint-Exupéry: "Il semble 
                    que la perfection soit atteinte non quand il n'y a plus rien 
                    à ajouter, mais quand il n'y a plus rien à retrancher...". 
                    Comme E = mc2 n'a pas été écrit en un 
                    jour, il a fallu des générations pour parfaire 
                    cette technique. Nous avons beaucoup à apprendre de 
                    ce peuple étonnant et attachant.   Programme scientifique: installation 
                    de capteurs HCB sur la banquise (photo Kalle Schmidt)
 Ce dimanche, nous installons aussi les absorbeurs HCB. Le 
                    matériel préparé par l'Université 
                    de Savoie se déploie sans difficulté malgré 
                    le froid mordant. L'arrimage sur la glace est simple: nous 
                    versons un peu d'eau liquide sur les pieds qui se soudent 
                    aussitôt à la banquise - technique d'Inuit! L'installation 
                    restera en place durant l'hiver. L'analyse se fera à 
                    notre retour en Europe, l'année prochaine. Enfin, nous venons d'inaugurer les pulkas particulièrement 
                    appréciables pour le transport de la précieuse 
                    eau potable que nous récoltons sous la glace d'un des 
                    nombreux lacs d'eau douce à 1km du bateau - c'est bien 
                    plus efficace que de porter un fût de 60 litres à 
                    dos d'homme! Enfin, après une journée passée 
                    à l'extérieur, nous retrouvons le confort à 
                    bord de Nanuq avec grande joie; accueil avec du thé 
                    chaud et bientôt une repas copieux pour reconstituer 
                    les calories brulées en plein air.  Nanuq dans son berceau de glace - 8 
                    novembre. Remarquez les safrans relevé pour éviter 
                    la pression de la glace. (photo Kalle Schmidt)
 Les journées se raccourcissent inexorablement. A quoi 
                    donc ressemblera la nuit arctique:  Les tableaux ci-dessous donnent les heures de lever et de 
                    coucher du soleil, de la lune ainsi que les heures de crépuscule 
                    à Qaanaaq / Qeqertat. Nous sommes à 77.5° 
                    de latitude Nord, la région traditionnellement habitée 
                    la plus septentrionale du monde. On distingue trois types de crépuscule...  schéma 
                    tiré de Wikipedia 
                    qui propose un excellent article
 Le crépuscule civil: Il correspond 
                    à la période entre le coucher du soleil et le 
                    moment où il passe de 6° sous la ligne d'horizon. 
                    La lumière est suffisante pour clairement observer 
                    des objets; un éclairage artificiel n'est pas nécessaire. 
                    C'est la définition de crépuscule utilisée 
                    par le grand public. Le crépuscule nautique: Il correspond 
                    à la période où le soleil passe de 6° 
                    à 12° sous la ligne d'horizon. A ce moment on distingue 
                    de justesse l'horizon, mais la vue devient difficile. Cette 
                    définition remonte à l'époque où 
                    l'on naviguait à l'aide des étoiles. Pour mesurer 
                    la hauteur d'une étoile à l'aide d'un sextant 
                    la ligne d'horizon doit être visible. Le crépuscule astronomique: Il correspond 
                    à la période où le soleil passe de 12° 
                    à 18° sous la ligne d'horizon. A ce moment le soleil 
                    commence à éclairer l'atmosphère. Au-delà 
                    le ciel est complètement noir. Ces crépuscules sont visibles à condition de 
                    profiter d'un ciel clair... Source des données : U.S. Naval Observatory, voir 
                    http://aa.usno.navy.mil/data/docs/RS_OneYear.php 
 Automne 
                    6 : Nous voilà (5 novembre 2015) Voici notre planète:  Paysages de glace et pleine lune : elle 
                    ne se couche pas, elle indique le Nord... (photo Peter Gallinelli)
 Ce début de Novembre marque la disparition définitive 
                    du soleil. Le crépuscule dure encore longtemps. Les 
                    journées de plus en plus courtes sont un spectacle 
                    de pastels quotidiennement renouvelé. Chaque jour nous 
                    gratifie d'une ambiance nouvelle. La baie, maintenant gelée, 
                    nous donne l'impression d'avoir atterri dans le creux d'un 
                    cratère extraterrestre. Notre bateau ressemble à 
                    un vaisseau spatial échoué là au terme 
                    d'un voyage interstellaire: un vaisseau truffé d'astuce 
                    et des ressources nous permettant de vivre dans cet environnement 
                    à la fois hostile et exceptionnel durant les 10 mois 
                    de solitude qui nous séparent du moment où la 
                    glace nous permettra de repartir ... vers notre monde. Les températures varient entre -10 et -20°C. Le 
                    congélateur! Nos sorties se font désormais en 
                    épaisses polaires doublées de combinaisons étanches. 
                    Ainsi équipés, nous ressemblons curieusement 
                    à des astronautes, exception faite de l'absence d'un 
                    respirateur, car nous avons de la chance: l''atmosphère 
                    de cette planète est parfaitement respirable et il 
                    suffit de se protéger le visage pour prévenir 
                    une engelure.  Nanuq solidement amarré dans 
                    'Nanuq's Cove' - observez les hauts fonds au milieu de la 
                    crique (photo Kalle Schmidt)
 Le sentiment d'isolement est saisissant. En dehors d'une 
                    opération de sauvetage un retour en arrière 
                    n'est pas envisageable. Pendant quelque temps nous ne pouvons 
                    compter que sur nos propres ressources. Ainsi le voyage prend 
                    une tournure de laboratoire d'autonomie - il s'agit de tout 
                    faire avec les moyens embarqués très limités 
                    et ce que la nature veut bien nous offrir. La seule ressource 
                    illimitée est notre créativité. Par exemple, la notion de déchet a pratiquement disparue. 
                    D'une part parce que nous n'avons aucune place pour accumuler 
                    des immondices. Mais aussi parce qu'il s'agit de matières 
                    utiles, donc précieuses. Ainsi un emballage qui finirait 
                    habituellement à la poubelle devient une matière 
                    première potentielle. Une ampoule électrique 
                    dans un pot de confiture vide devient un corps de chauffe 
                    pour maintenir notre compost à température. 
                    Un panneau isolant devient un matériau de construction 
                    polyvalent. Nombre de pièces viennent de la récupération. 
                    Peu à peu, par nécessité, nous nous approprions 
                    de l'art de la débrouillardise si familière 
                    à la culture inuit, capable de transformer avec génie 
                    des matériaux simples en objets de valeur exceptionnels. 
                    Quel contraste avec le monde du prêt à jeter. Même l'air usé de la cabine est recyclé. 
                    Nous avons inauguré notre porte à récupération 
                    il y a quelques jours. Ainsi la chaleur et l'humidité 
                    sont valorisées par un échangeur de chaleur. 
                    L'eau de condensation rejoint l'eau douce liquide particulièrement 
                    précieuse en arctique. La chaleur sert à préchauffer 
                    l'air frais avant d'entrer dans la cabine. Un microcontrôleur 
                    s'occupe de la gestion des ventilateurs pour aérer 
                    ce qu'il faut quand il faut et éviter que l'échangeur 
                    ne gèle. Un des nombreux développements pour 
                    le 'passive igloo' que nous testons durant l'hiver. Il ne 
                    nous reste plus qu'à faire passer le tuyau de prise 
                    d'air dans l'eau de mer. Elle ne descend jamais en-dessous 
                    de -2°C. C'est chaud quand il fait froid : -30°C... Et puis il y a ces dispositifs passifs tels que isolation 
                    thermique ou les vitrages isolants tellement discrets qu'on 
                    en finit par les oublier. Pourtant sans eux cette expédition 
                    serait impensable. A suivre... 
 Automne 5 : Embâcle 
                    sur Harward Oer (28 octobre 2015) Peu à peu Nanuq se transforme d'Umiaq, le 
                    bateau, en Iglou, l'habitat au sens inuit du mot. 
                    Installations, réaménagements, rangements: nos 
                    journées sont bien remplies. Ainsi notre liste des 
                    tâches s'est progressivement raccourcie. Nous rencontrons 
                    aussi des surprises telles des points de condensation imprévus 
                    - malgré une construction soignée. Ainsi le 
                    système de ventilation prend toute son importance, 
                    de même qu'une gestion rigoureuse des sources de vapeur: 
                    lessive, cuisine, nous.  Notre vaisseau, échoué 
                    sur une autre planète - Nanuq en arctique (photo Kalle 
                    Schmidt)
 La grande éolienne a trouvé sa place sur son 
                    mat dans le cockpit et elle a commencé à produire 
                    ses premiers kWh. Nous sommes tous émerveillés 
                    de voir comment cet engin transforme un élément 
                    naturel, gratuit, illimité en électricité 
                    précieuse. A présent nous souhaitons du vent 
                    modéré et abondant. Sommes-nous au bon endroit? 
                    Le peu d'éléments connus sur cette région 
                    ne permettent pas d'en faire une prévision fiable. 
                    Nous allons devoir nous accommoder de ce qu'il y aura. Que 
                    ce soit l'abondance ... ou le contraire. Progressivement nos vivres fraîches s'épuisent 
                    et laissent la place aux légumineux et féculents. 
                    Il nous faut à présent développer notre 
                    créativité pour composer des plats nourrissants 
                    et appétissants à partir d'une variété 
                    d'ingrédients limités. Et ça se passe 
                    plutôt bien. En dehors de quelques occasions, nous avons 
                    éliminé les pâtes, populaires et faciles 
                    à préparer, mais très gourmandes en eau 
                    et en énergie et grande source de vapeur d'eau. En 
                    contrepartie les potages et soupes à base d'haricots, 
                    de lentilles et de pois ont la cote. Faciles à préparer 
                    en cocotte-minute, il suffit de penser à faire tremper 
                    les graines conservées secs quelques heures avant la 
                    préparation. La redécouverte d'un ancien art 
                    de cuisiner, un délice. Notre stock d'épices 
                    en gros pots constitue un élément important 
                    de ce menu. Chaque dimanche, nous fabriquons 2kg de pain frais pour la 
                    semaine - un moment très apprécié lorsque 
                    le parfum de pain frais et la chaleur du four envahissent 
                    la cabine. Pour les grandes occasions un gâteau ou une 
                    pizza viennent apporter du changement. Ainsi, en dehors d'un 
                    manque croissant de frais, nos menus n'ont rien à envier 
                    à la cuisine terrestre. Hélas, la saison n'est 
                    pas propice à la pêche. Mais ce n'est que passager. 
                    Une fois la banquise formée, notre menu se verra agrémenté 
                    de ce qui constitue la base alimentaire des peuples traditionnels 
                    du Groenland.    La glace - enfin! Nanuq se transforme 
                    en 'iglou' (photos Peter Gallinelli)
 Epaisseur de glace : 15 cm. Les visites chez nos amis au 
                    village sont temporairement terminées - nous n'osons 
                    pas trop jouer au brise-glace avec notre annexe pneumatique 
                    pour nous y rendre. La glace toute neuve autorise tout au 
                    plus une première promenade prudente à proximité 
                    du bateau, accompagnée de l'annexe que nous trainons 
                    avec nous - au cas où la couche encore fragile cèderait... 
 Automne 
                    4 : Baie tempête - Stormy Bay  (25 octobre 
                    2015) Cette nuit nous n'avons pas fermé l'oeil. Prêt 
                    à bondir de nos sacs de couchage nous participons au 
                    spectacle donné par mère nature: symphonie polyphonique 
                    de sifflement aigu dans le gréement, raclement de la 
                    coque dans son berceau de glace encore fragile qui cogne ou 
                    des craquements sourds quand un morceau de glace s'en détache, 
                    une sangle qui frappe, un hauban qui vibre, un objet qui se 
                    déplace quand le bateau gite sous la pression d'une 
                    rafale, les aussières frappées sur de solides 
                    rochers à terre qui craquent sur leurs taquets, neige 
                    et poussières qui sablent la coque... De temps à 
                    autres nous allumons le projecteur de pont qui éclaire 
                    le bateau et les environs pour vérifier si nous bougeons 
                    - car nous ne connaissons pas encore la dynamique de la jeune 
                    glace, prête à partir à la dérive 
                    avec nous. Pour vérifier aussi si l'annexe est encore 
                    là; après plusieurs tentatives d'envol, nous 
                    l'avons amarré retourné sur la banquise sous 
                    le vent du bateau - elle est sage à présent.  Arrivée à 'Stormy Bay' 
                    (photo Kalle Schmidt)
 Encore une de ces tempêtes du Sud qui font la renommée 
                    de cette région. Nous y avons été initiés 
                    dès les premiers jours sur l'emplacement que nous pensions 
                    être notre mouillage d'hiver. Nous étions avertis 
                    d'un vent tempétueux sur la calotte glaciaire. La force 
                    annoncée pour notre secteur était de 35 noeuds, 
                    un coup de vent normalement très gérable au 
                    mouillage. Nous avions failli y croire un moment: le mouillage 
                    sur deux ancres et deux aussières à terre semblait 
                    parfait... jusqu'à ce que les premières rafales 
                    s'abattent sur Nanuq, tel un immense marteau. Juste à 
                    temps, nous nous dégageons de l'emplacement exigu pour 
                    mouiller notre ancre à proximité, hors de portée 
                    des rochers à fleur d'eau. C'est maintenant que la 
                    véritable tempête se lève. Malgré 
                    la bonne tenue du mouillage il devient impossible d'encaisser 
                    plus que quelques rafales avant de chasser. Elles dépassent 
                    allègrement 60 noeuds. Sous la pression des plus fortes 
                    - notre anémomètre indique désormais 
                    plus de 70 noeuds - notre mouillage n'a aucune chance. Moteur! Il fait nuit. Pas question de laisser la voile d'artimon 
                    si utile en place, elle serait déchirée sur 
                    le coup. Le gréement hurle et il est impossible de 
                    communiquer autrement qu'en geulant à pleins poumons 
                    à moins de 2 mètres - notre élégant 
                    langage des signes pour coordonner la manoeuvre du guindeau 
                    est inutilisable dans l'obscurité. A sec de toile Nanuq 
                    se fait coucher jusqu'à plonger les passavants sous 
                    l'eau. La visibilité n'est que de quelques mètres. 
                    Tout est blanc. Le vent souffle maintenant en ouragan et arrache 
                    l'eau à la mer qui s'est transformée en mousse 
                    bouillonnante. La limite entre l'air et l'eau est incertaine. 
                    Nous sommes sur le pont, trempés, en faisant des ronds 
                    dans l'eau en attendant une accalmie... bien que non-fatal, 
                    nous n'avons aucune envie de nous retrouver sur un haut fond 
                    pour y passer l'hiver. Mais nous profitons aussi de conditions atténuantes: 
                    il fait chaud (0°C), la pleine lune nous octroie le minimum 
                    de visibilité pour distinguer l'ombre de la côte 
                    et notre baie profite d'une parfaite protection de la mer. 
                    Dans les accalmies nous étalons de justesse en marche 
                    arrière. En revanche, Nanuq remonte aisément 
                    contre les éléments en marche avant nous permettant 
                    de nous repositionner dès que nécessaire. Le 
                    diesel ronronne comme si de rien était en montant à 
                    peine les tours. C'est très rassurant! Aux premières lueurs du jour, le vent tourne progressivement 
                    au Sud, nous permettant d'attraper nos aussières à 
                    terre. Manoeuvre délicate réussie, nous saisissons 
                    le filin salvateur. Oufff! Il est temps de récupérer. 
                    Si l'adrénaline est une arme redoutable - ni fatigue, 
                    ni froid, ni faim et des sens aiguisés - cette dépense 
                    nécessite récompense. Nous dormons enfin en 
                    veillant à tour de rôle. Les rafales diminuent. 
                    Plus que quelques-unes font déclencher l'alarme de 
                    vent fort réglé précautionneusement à 
                    60 noeuds. Au fil de la journée le vent tombe. Nous 
                    constatons les dégâts: parmi coussins et objets 
                    divers, un bol de spaghetti bolognaise décore le plancher 
                    du carré. Les équipets mal fermés ont 
                    rendu leur contenu. Suite au dur labour du fond marin, l'ancre 
                    et la chaine encore toutes neuves la veille sont marquées 
                    de rayures jusqu'au métal nu. Mais Nanuq et son équipage 
                    sont solides - pas une égratignure. Seulement le cairn 
                    dressé à terre la veille a disparu...!  Notre mouillage à 'Stormy Bay', 
                    le jour avant la tempête (photo Kalle Schmidt)
 A la lumière de ce que nous avons vus cette nuit, 
                    tout ce que nous avons craint par le passé semble dérisoire. 
                    Aussi, nous changeons de fusil d'épaule: plus question 
                    de laisser le moindre doute quant au choix de notre camp d'hiver. 
                    Nous redevenons nomades pour passer de mouillage de Nord à 
                    mouillage de Sud, selon les conditions. En affinant l'exploration 
                    de la région nous découvrons une minuscule anse, 
                    parfaite. Nous en sommes à nous demander si ce n'est 
                    pas notre voeu qui a fait naître ce mouillage là 
                    où nous étions passés deux semaines auparavant, 
                    sans rien voir. Ainsi Nanuq est installé entre deux solides aussières 
                    au Nord et deux au Sud. La longueur de tout notre matériel 
                    de mouillage y passe. Nul envie de refaire des ronds dans 
                    la baston, peut-être, voire probablement sans conditions 
                    atténuantes. 
                     
                      |  Mouillages:
 Harward Oer 77°29.5'N 66°33,5'W : s'il existe 
                          de nombreuses possibilités de mouillage dans 
                          le havre naturel formé entrée les deux 
                          principales îles de Harward Oer, le seul qui se 
                          pratique exclusivement à l'aide d'aussières 
                          frappées à terre est celui que nous nommons 
                          inofficiellement 'Nanuq's Cove'. La protection des tempêtes 
                          du Sud est bonne, du Nord raisonnable. Les vents du 
                          secteur E et W sont modérés. Le centre 
                          de la crique est encombré de plusieurs rochers 
                          découvrantà marée basse. Le fond 
                          manque de profondeur, hélas. Il convient de frapper 
                          2 aussières à terre au S et 2 au N près 
                          de l'entrée. Des grosses sangles de levage sont 
                          parfaites pour entourer les rochers à terre. 
                          Il faut compter 200m d'aussière. Les fonds y 
                          sont environ de 3m. Un lac profond a 1km au SE permet 
                          un approvisionnement en eau potable. Les promenades 
                          sont belles et variées. Distance au village de 
                          Qeqertat 2.5km à vol d'oiseau. Nécessite 
                          l'annexe pour traverser la baie. Les marées de vives eaux sont d'environ 3m, 
                          de moitié en mortes eaux. |     Région 
                    de Qaanaaq : 77° de latitude Nord © worldwind 
                    NASA bluemarble 2014
 Automne 
                    3 : Nouveaux murs photos (28 septembre 2015)  Nanuq au mouillage à Qaanaaq 
                    - vue depuis Hotel 
                    Qaanaaq (photo © Hans Jensen)
 Un dernier partage avant de quitter Qaanaaq pour de bon: Amitiés et bientôt,Peter & crew
 
 Automne 
                    2 : La dernière ligne droite (26 septembre 
                    2015) Nuit agitée  au mouillage de Qaanaaq. Le vent du nord souffle en rafales 
                    de 40 noeuds en dévalant les pentes au-dessus de la 
                    ville. Le mouillage est exceptionnel, les fonds sont d'une 
                    tenue à toute épreuve, heureusement. Grace à 
                    notre ancre FOB de 40kg et ses 50 mètres de chaine 
                    de 12mm, le bateau encaisse et notre igloo reste un havre 
                    de paix à l'épreuve du temps. Une lune presque 
                    pleine éclaire les icebergs qui défilent dans 
                    le fjord et la poussière qui dévale les montagnes 
                    en contre-jour. A deux encablures de l'étrave les lumières 
                    de Qaanaaq brillent en guise d'encouragement. Oui, ce lieu 
                    improbable est bel et bien habité. Hostile de prime 
                    abord, les deux semaines passés ici commencent à 
                    nous faire entrevoir ce qui attache les gens ici. Sans aucun 
                    doute nous nous trouvons face à une des plus belles 
                    vues du monde. Hans Jensen, patron de l'incontournable Hotel 
                    Qaanaaq nous le confirme - la vue depuis l'hôtel 
                    est exceptionnelle!  Glace nouvelle - elle repartira, poussée par le premier 
                    coup de vent (photo Jakob Gallinelli)
 Quant à l'organisation du quotidien, elle se fait 
                    sans empressement et dans le respect du temps des hommes. 
                    Il n'est pas question de brûler une étape ou 
                    de forcer l'impossible. Ici le temps est respecté et 
                    il y a toujours un moment de société. Nous nous sentons les bienvenus et nous essayons d'honorer 
                    l'accueil qui nous est offert en donnant en retour ce que 
                    nous pouvons. Les opportunités sont nombreuses pour 
                    échanger et d'en apprendre les uns sur les autres, 
                    que ce soit en faisant notre avitaillement, des petits travaux, 
                    en organisant notre séjour, en visitant l'école, 
                    en participant à une soirée... ainsi des amitiés 
                    se tissent. Nous avons beaucoup de gratitude pour l'accueil 
                    spontané des gens d'ici, de même que pour les 
                    innombrables coups de mains, encouragements et conseils que 
                    nous avons reçus tout au long de notre marche d'approche. Oui ce pays-continent (bien plus qu'une île) est magique. 
                    Autant par sa géographie que par le peuple qui l'habite. 
                    Nous avons beaucoup à en apprendre.    Collecte de glace pour la production d'eau potable selon la 
                    tradition groenlandaise à partir de glace multimillénaire 
                    exempte de toute pollution (photos Peter Gallinelli)
 Hier la bonne nouvelle est tombée: nous avons enfin 
                    le feu vert du gouvernement et des autorités locales 
                    pour hiverner sur territoire groenlandais, ici dans la région 
                    de Qaanaaq. A présent, la voie est libre: en dehors 
                    de la dernière correspondance avant longtemps tout 
                    est prêt. Eh oui. Notre cordon Internet nous 
                    reliant tant bien que mal au monde sera coupé 
                    pour de longs mois. Une véritable cure de désintoxication 
                    nous attend. Si nous avons déjà appréhendé 
                    l'autonomie, Il va falloir réapprendre le courrier 
                    postal - dont une partie voyagera par traineau à chiens 
                    - et les semaines d'attente d'une réponse. Mais n'ayez 
                    crainte; ce blog ne sera pas interrompu pour autant: de temps 
                    à autres nous glisserons une carte SD dans une enveloppe 
                    pour faire partir des mises à jour ... comme le résume 
                    un ami 'une combinaison de rusticité et de modernité 
                    pour atteindre l'efficacité.' Et un retour en 
                    sens inverse est également possible - un suffit de 
                    poster un mot sur ici... Dans peu de temps Nanuq ira mouiller son ancre dans une baie 
                    parfaite de Harward Oer. Notre bateau se transformera alors 
                    définitivement en iglou - au sens groenlandais : maison. 
                    Fini la houle du large, pétoles et coups de vent et 
                    les incertitudes de la navigation. Place à une nouvelle 
                    aventure, celle de l'apprentissage du froid: un long tunnel 
                    sans possibilité de retour en arrière ... sous 
                    le regard bienveillant des habitants de la région qui 
                    ne nous prennent pas pour des fous, mais souhaitent la bienvenue 
                    à notre initiative. Histoire à vivre... A vous qui lisez ces lignes, nous vous souhaitons un bel 
                    automne et au plaisir du prochain post ... dans quelque temps. A bientôt,Peter & Crew
 
 Automne 1 : 
                    Inglefield Bredning - Qeqertat (15 septembre 2015)  Bowdoin Fjord, fin de saison, région de Qaanaaq, Groenland 
                    (photo Peter Gallinelli)
 Si vous lisez ces lignes, c'est que nous sommes de nouveau 
                    à Qaanaaq et la connexion data via la 3G fonctionne 
                    - c'est inespéré - et donc précieux! 
                    Nous espérons pouvoir tenir notre mouillage exposé 
                    au pied de la 'capitale' le temps de cette dernière 
                    escale technique avant l'hiver.   Nanuq au mouillage à Harward Oer (70°30'N); coucher 
                    du soleil après la neige (photo Peter Gallinelli)
 Long de 80 milles et large de 10, Inglefield 
                    Bredning est un fjord marquant de la côte NW du Groenland. 
                    C'est aussi ici que la communauté traditionnelle la 
                    plus septentrionale du monde habite depuis la nuit des temps. 
                    800 âmes y vivent, dont 600 à Qaanaaq - ville 
                    artificielle bâtie dans les années 50 par les 
                    forces armées américaines. Le reste est dispersé 
                    sur un territoire grand comme la Suisse! Les principales activités 
                    sont la chasse et la pêche. Qaanaaq est aussi un lieu incontournable pour 
                    beaucoup d'expéditions, comme nous l'explique Hans 
                    Jensen du petit et seul hôtel de la ville. On y trouve 
                    tout, ou presque, mais il faut anticiper. Le cargo de ravitaillement 
                    ne passe que deux fois dans l'année. L'Arina Arctica 
                    est au mouillage et la barque de chargement fait d'incessants 
                    va-et-vient. Les habitants sont joyeux comme si c'était 
                    noël: il y a des vivres fraîches dans les rayons 
                    du magasin, d'autres installent et testent leur hors-bord 
                    tout neuf! En sens inverse des machines usagées et 
                    conteneurs vides repartent en direction du Danemark.    Mouillage de Kangerdharssuk. Première neige 11 septembre 
                    2015 (photos Peter Gallinelli)
 Après une journée technique, et avec l'autorisation 
                    de l'administration locale, nous partons à l'exploration 
                    du fjord. La température est passée en-dessous 
                    de 0°C. Le vent souffle et il neige. Le paysage jadis 
                    coloré et minéral se couvre d'un manteau blanc. 
                    Magie de l'hiver! Le barreur, attentif à la glace omniprésente, 
                    s'équipe d'habits chauds et d'un masque de ski.    Barreur bien équipé sous la première 
                    neige. Les falaises de grès près de Qaanaaq 
                    (photos Dolores Gonzalez)
 Ainsi, nous remontons jusqu'à Harward Oer, un archipel 
                    qui nous semble offrir des bonnes possibilités de mouillage 
                    en raison de la roche granitique qui le constitue. Long de 
                    8 milles, un havre naturel est formé entre l'île 
                    du N et l'île du S. Nos espoirs sont récompensés: 
                    les mouillages sont nombreux et bons. A notre surprise, la végétation est abondante. 
                    A cette saison les fleurs sont fanés, mais il reste 
                    les traces d'une flore qui contraste avec les falaises et 
                    fronts de glace inhospitaliers qui forment le fond du fjord. 
                    Ce n'est certainement pas un hasard si les hommes s'y sont 
                    installés. Les 4 familles qui habitent le minuscule 
                    village de Qeqertat préfèrent le calme et la 
                    nature à l'effervescence de la 'ville'. Tout est relatif; 
                    Qaanaaq, la 'ville' à 70km à l'W, ne compte 
                    que 600 habitants...  Extrait de la carte de navigation de la région. (© 
                    Kort & Matrikelstyrelsen, Miljoministeriet, Danmark)
 C'est peut être ici que nous élirons domicile 
                    pour l'hiver. En dehors de l'absence d'un réseau permettant 
                    une communication aisée, toutes les qualités 
                    essentielles y sont réunies, à commencer par 
                    un mouillage qui semble sûr sans être encaissé. 
                    Et malgré la barrière du langage, le premier 
                    contact avec les habitants du village est chaleureux.    Nanuq au mouillage à Harward Oer, peut être notre 
                    mouillage d'hiver. Le village de Qeqertat vu de l'W (photos 
                    Kalle Schmidt)
 A présent, nous redescendons sur Qaanaaq. Une fois 
                    de plus, nous mouillons notre ancre dans les eaux rouges de 
                    Kangerdharssuk, abrité du vent du S qui souffle en 
                    rafales de 30 noeuds. L'été est terminé. 
                    Tels des oiseau migrateurs suivant les saisons, il est temps 
                    pour certains de partir. Le petit bimoteur ne vole qu'une 
                    seule fois par semaine et ne se pose que le temps de décharger 
                    le fret. Restera un équipage de trois et de belles 
                    aventures en perspective! 
                     
                      |  Mouillages:
 ATTENTION : la navigation à l'E de Qaanaaq nécessite 
                          une autorisation. Se renseigner à la Mairie. 
                          Il est également utile de se renseigner auprès 
                          des chasseurs locaux pour éviter toute interférence 
                          avec leurs activités. Kangerdharssuk 77°33'N 68°35'W : mouiller par 
                          15m fond de sable et limon de bonne tenue dans l'anse 
                          formée au S du delta d'alluvions. Le rayon d'évitage 
                          est juste suffisant devant le seuil découvrant 
                          à basse mer qui borde la cote sur 20-40m (rochers). 
                          Ouvert du N à l'E. Lors de coups de vent du SE 
                          de la glace s'accumule dans la baie. Dans ce cas un 
                          mouillage d'attente se trouve sur la côte opposée 
                          du fjord, au pied de la falaise qui borde le S du delta 
                          - fonds raides, mais de benne tenue. Endroit riche en 
                          végétation. Quelques cabanes utilisées 
                          par des chasseurs, restes de village désaffecté. 
                          Accès facile à la calotte glaciaire de 
                          Piulip Nunaa. Cadre alpin. Harward Oer 77°29.5'N 66°29.3'W : mouillage 
                          à 2.5 milles à l'E du village de Qeqertat. 
                          Fonds de bonne tenue. Protégé de la glace 
                          et de la mer en toute direction, mais protection du 
                          vent faible en raison du relief doux. La traversée 
                          de la baie qui sépare le N du S de l'île 
                          se fait en restant dans l'axe: fonds de 15 à 
                          45m. Pour la passe d'entrée W: contourner par 
                          le S les ilots (77°29N 66°42W) près du 
                          village de Qeqertat. Accès au mouillage par le 
                          N. Promenade de 45' vers le point culminant de l'archipel 
                          (nombreux éboulis, petits lacs d'eau douce). Harward Oer 77°30.4'N 66°24.6'W : excellent 
                          mouillage dans une baie fermée à 4M à 
                          l'E du village de Qeqertat. Fonds au choix entre 8 et 
                          25m de très bonne tenue (sable et limon). La 
                          meilleure protection des vents du S se trouve dans le 
                          S de la baie, juste à l'W de la passe d'entrée 
                          (mouiller par 15m de fonds et porter 2 aussières 
                          à terre). Sur tout le pourtour se trouve un plateau 
                          découvrant à BM bordé de rochers 
                          à 20-50m de la cote. Attention: donner un large 
                          tour aux rochers découvrant à basse mer 
                          à 50m au SW de la passe d'entrée. Environnement 
                          doux et végétal. Promenade de 15' vers 
                          l'E à un point culminant qui domine le vaste 
                          fond du fjord. Info: Communication dans la région sur VHF canal 10. 
                          Pas de relais VHF avec Asiaat Radio. |  
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